Benozzo Gozzoli, Le triomphe de saint Thomas d'Aquin, 1471

vendredi 13 mai 2011

Nicolas Poussin, « L’inspiration du poète » (I)

            Poussin nous a laissé deux tableaux figurant L’Inspiration du poète. Le plus connu, dont nous avons déjà parlé[1], se trouve maintenant au Louvre, et remonte à 1629 ou 1630. Mais il existe une version antérieure, datée de 1627, qui témoigne d’une inspiration assez différente, et que l’on peut voir au Niedersächsisches Landesmuseum de Hanovre. Cette œuvre montre de manière immédiatement perceptible les deux caractéristiques de la décennie 1620, qui révèlent un certain maniérisme résiduel : la fraîcheur, voire la sensualité du coloris, qui n’a pas encore la rigueur des années de maturité ; et la présence de putti décoratifs, qui portent ici des couronnes de laurier, des rameaux et des fleurs. Ceci étant, il s’agit bien d’un Poussin ! Le thème aussi bien que son traitement pictural attestent en effet le classicisme fondamental de l’artiste, et c’est bien pourquoi nous le proposons à nos lecteurs.
            Au premier plan est assis Apollon, aisément reconnaissable à la lyre qu’il a déposée à ses pieds, et davantage encore, peut-être, aux couleurs solaires de sa peau, ocre chaude, et de son manteau, jaune mordoré. Le dos appuyé contre le rocher qui surplombe la Fontaine de Castalie, il verse une coupe contenant un peu d’eau de cette source enchantée dans la bouche d’un poète. Celui-ci, vêtu de blanc nacré de rose, génuflecte en position d’orant devant le dieu, dont il reçoit ainsi l’inspiration. La pose un peu sévère, la muse Euterpe, dont l’attribut est la flûte qu’elle tient de la main droite, fixe la scène du regard. Prenant place dans cette représentation éminemment apollinienne, elle ne pouvait être habillée autrement que de bleu et de blanc, de manière à compléter l'harmonie des couleurs célestes. Des arbres dont on ne voit pas le sommet confirment par leur verticalité le lien que la scène institue entre poésie, inspiration et transcendance.

Nicolas Poussin, L'Inspiration du poète (I), 1627.
Hanovre, Niedersächsisches Landesmuseum.

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